La guerre psychologique menée par le Kremlin contre l’Europe, par Kevin Limonier

Dans les colonnes de Challenges, Kevin Limonier, professeur à l’Institut français de géopolitique et directeur adjoint de GEODE, revient sur les survols de drones attribués à la Russie et les inscrit dans une stratégie de guerre psychologique du Kremlin contre l’Europe.
Selon le chercheur, ces opérations poursuivent tant un objectif de renseignement, en permettant de tester la sécurité de sites stratégiques, qu’une dimension psychologique marquée, puisqu’elles visent à instaurer un sentiment durable d’insécurité au sein des populations d’Europe de l’Ouest. Pour Kevin Limonier, cette stratégie n’a rien de nouveau et s’inscrit dans une tradition classique de guerre psychologique, dont l’objectif est de susciter la peur et l’angoisse dans les sociétés ciblées.
Limonier souligne que ces incidents ne prennent pleinement sens que lorsqu’ils sont analysés dans une perspective d’ensemble. Pris isolément, ils peuvent sembler mineurs, mais replacés dans une matrice globale, ils relèvent d’une stratégie cohérente de « harcèlement géopolitique ». Celle-ci vise à affaiblir la confiance des citoyens envers leurs autorités et les institutions démocratiques, et surtout à entraver le soutien occidental à l’Ukraine, un objectif qu’il qualifie de « vital » pour Moscou.
À moyen terme, le chercheur estime que la Russie se prépare à une confrontation plus directe avec l’Occident et se perçoit déjà comme engagée dans une situation de quasi-guerre. Dans ce contexte, il rejette la notion de « guerre hybride », qu’il juge trop floue et insuffisante pour rendre compte d’une menace désormais tangible, concrète et susceptible d’affecter directement les sociétés européennes.
L’article met toutefois en lumière les limites du dispositif russe. Si les survols de drones ont effectivement bénéficié d’un important écho médiatique, ils ont aussi contribué à renforcer un consensus défavorable à la Russie en Europe. Kevin Limonier explique ce paradoxe par le mode opératoire du Kremlin, qui pilote la stratégie globale tout en sous-traitant les opérations de déstabilisation à un vaste réseau de sociétés d’influence financées par des organisations publiques russes. Cette délégation laisse une grande autonomie aux opérateurs et limite la capacité du pouvoir central à anticiper l’ensemble des conséquences politiques et sociales de leurs actions.
Kevin Limonier conclut que ces pratiques pourraient, à long terme, se retourner contre Moscou. En cherchant à semer l’insécurité, la Russie contribuerait paradoxalement à provoquer un « réveil géopolitique de l’Europe » d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale.
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